Voir son agresseur
Partout sur les écrans et
Sur toutes les scènes.

La célébrité confère-t-elle un niveau de protection aux personnes qui commettent des agressions sexuelles ? Si ce sujet est trop difficile pour vous, inutile de lire le reste, la réponse est oui.

Les individus sont responsables de leur propre comportement et toute personne qui en agresse une autre doit en rendre compte; ça, c’est une évidence. Il faut aussi comprendre que tout comportement s’inscrit dans un contexte culturel – est notre société est structurée de sorte que les individus qui jouissent d’un statut de célébrité se trouvent dans une position de pouvoir particulière, qui rend difficile la dénonciation d’un abus.
Je ne vous apprends rien quand je dis que les vedettes jouissent d’une adoration et d’une vénération qui, dans d’autres civilisations, étaient réservées à la royauté ou aux figures religieuses. La relation parasociale que les gens entretiennent avec les vedettes fait en sorte qu’elle apparaissent comme un proche pour elleux, comme quelqu’un qu’iels connaissent personnellement et qui sont, par conséquent, très crédibles. Si une victime ne jouit pas de ce niveau de crédibilité – et parce que c’est presque toujours la parole de l’une contre celle l’autre – elle se rend compte qu’il est très difficile de dénoncer une agression. En d’autres mots, la culture de la célébrité est une des composantes de la culture du viol.
Quand leur agresseur est une personne célèbre, de nombreuses personnes peuvent penser qu’elles ne seront pas crues si elles la dénoncent. Plus la célébrité est grande, plus la dénonciation devient improbable, moins la victime sera crue et plus la victime risque d’être clouée publiquement au pilori. Le drame, c’est qu’en cette ère hypermédiatisée, de plus en plus de gens jouissent d’une micro-célébrité. Si vous faites partie d’une sous-culture particulière, votre agresseur peut être un inconnu pour le grand public, mais une célébrité pour les gens qui participent à cette sous-culture. Quand cela arrive, les victime non seulement se mettent à voir leur agresseur dans toutes les plateformes en ligne qu’elle fréquente, mais elle risque aussi d’être mise au ban de la sous-culture dans laquelle elle évolue. C’est particulièrement vrai dans les sous-cultures marginalisées, comme les furries ou les adeptes du BDSM.
Tous les milieux sans exception sont susceptibles de protéger leurs célébrités quand elles s’avèrent être des abuseurs. Même les milieux de gauche, même les milieux queer, même les milieux féministes. Voila pourquoi il faut faire un effort conscient, dans tous les cercles dans lesquels nous évoluons, pour faire évoluer la culture vers la tolérance zéro en matière d’agression sexuelle.
Dans plusieurs société autochtones, il existe des mécanismes sociaux pour remettre les pieds sur terre des personnes trop adulées, trop célèbres. Un chasseur d’exception va se faire ridiculiser sur d’autres aspects de sa personne pour que son égo ne devienne pas surdimensionné et qu’il n’amasse pas un pouvoir dangereux sur les autres membres de la communauté. Ce serait peut-être une bonne idée de s’en inspirer dans nos propres milieux; qui sait, ça pourrait peut-être contribuer à ce que les victimes soient crues.

À demain pour un autre tercet obscène.
Si l’envie vous prend d’appuyer financièrement ce projet, n’hésitez surtout pas à le faire!


Participez à la discussion !