Mille gouttes opalines

Un senryū érotique chaque matin, pendant mille jours

Huit-cent-soixante-quinzième goutte

Ce qu'il nous faudrait :
Plusieurs milliers d'émeutes
Comme Stonewall.

C’est aujourd’hui Stonewall day, mais le temps n’est ni aux célébrations, ni aux commémorations, mais à l’attaque. Rappelons-nous que les émeutes de Stonewall ont été lancées (entre autres) par une femme noire transgenre: Marsha P. Johnson. C’est en grande partie grâce à elles et d’autres personnes transgenre anonymes que le mouvement contemporain en faveur des droits des personnes LGBTQIA+ débuta en 1969.

À gauche: Sylvia Rivera et Marsha P. Johnson, deux femmes transgenre qui en 1969 ont affronté les flics en leur lançant tout ce qui pouvait être lancé: des bouteilles, des briques, des pierres. Plus que jamais, l’heure est aujourd’hui à l’action directe et à la révolte.

Toutefois, au cours des 56 années qui se sont écoulées depuis Stonewall, les personnes transgenres noires telles que Marsha P. Johnson n’ont pas bénéficié du mouvement qu’elles ont lancé. Un exemple parmi d’autres: en 2019 aux États-Unis, au moins 26 personnes transgenres et non-binaires ont été assassinées ; 91% d’entre elles étaient des femmes noires.

Vous ne vous en souvenez probablement pas, parce qu’il s’est produit tellement d’ignominies ces derniers mois, mais une des premières mesures du régime fasciste de Donald Trump au début de février dernier a été de faire disparaître toute mention de l’existence des personnes transgenre sur tous les sites web du gouvernement américain. Résultat: le site du monument national de Stonewall a non seulement escamoté les personnes transgenre qui ont courageusement lancé le mouvement,mais a fait carrément disparaître le T de LGBT.

Ce T manquant me blesse comme une brûlure.

C’est bel et bien d’élimination dont il est question. Un génocide commence toujours dans le champ symbolique, avant d’être réalisé dans le monde réel. Les fascistes veulent faire disparaître les personnes transgenre, veulent les empêcher d’exister sur la place publique. Ce n’est qu’une question de temps avant qu’ils les empêchent d’exister tout court. Et lorsque ce sera accompli, lorsque le T aura été éliminé, ce sera au tour du L, du G et du B. Oh, et ne pensez pas que vous êtes à l’abri si vous êtes cisgenre et hétérosexuel·e; les fascistes voudront vous faire la peau si vous n’êtes pas à la hauteur de leurs critères à la con qui définissent la masculinité et la féminité. Personne n’est à l’abri, parce qu’un régime fasciste ne peut se maintenir sans ennemis à éliminer, c’est ainsi qu’il justifie son pouvoir. Pour un fasciste, les alliés d’aujourd’hui sont toujours les ennemis de demain.

Voilà pourquoi je parle de la nécessité de centaines, de milliers d’émeutes. Les fascistes ne comprennent qu’un seul langage: celui de la force. Il faut riposter coup pour coup, c’est notre seule chance d’éviter la répétition des pires horreurs du siècle dernier. Devenir ingouvernables est notre seule chance de survie.

Et puis, une bonne émeute n’est jamais faite en vain. Certaines d’entre elles ont le pouvoir de donner naissance à un monde meilleur.

À demain pour un autre tercet obscène.

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