Comme l’androgyne
Qu’évoquait Aristophane
Toi et moi soudées.

C’est dans le banquet, un dialogue entièrement consacré à l’amour, que Platon raconte, à travers Aristophane qui intervient dans le dialogue avec Socrate,un mythe qui a pour but de rendre raison de ce que la raison ne peut pas décrire: de cette incomplétude de l’individu lorsqu’il n’est pas encore en lien par l’amour avec l’autre.

Le mythe de l’androgyne, raconté par Aristophane, a quelque chose d’infiniment étrange et pourtant de très évocateur. Les humains originels, dit-il en substance, ne ressemblaient pas du tout à ceux d’aujourd’hui. Ils étaient sphériques, androgynes et indistincts. Dans la Grèce antique, la sphère est un symbole de perfection, alors les individus étaient par nature complets et parfaits. Iels étaient à l’image des astres, en cela que rien qu’iels se suffisaient à elleux-mêmes et rien ne les contraignait.
Ces êtres parfaits étaient si puissants qu’ils ont osé s’attaquer aux dieux en tentant d’escalader le ciel (en rebondissant comme des boules) pour aller les combattre. Hélas! Les humains ont perdu cette guerre et Zeus, pour éviter toute récidive, prit la décision de les briser, de les couper en deux en faisant d’elleux des êtres incomplets.
Depuis, nous vivons dans la nostalgie de cette complétude originelle que nous espérons sans cesse retrouver. Platon (par la voix d’Aristophane) se sert de ce mythe pour expliquer cette soif essentielle des humains qui découle de leur conviction intime de ne pas être complets, pour comprendre ce besoin de l’autre qui permet à tous et toutes de s’accomplir. Nous cherchons littéralement notre autre moitié.
«L’amour recompose l’antique nature», dit Aristophane, «s’efforce de fondre deux êtres en un seul et de guérir la nature humaine». L’amour est à la fois le trouble de l’existence et le remède à ce trouble. Ce n’est pas l’amour qui nous fait souffrir, mais c’est l’incomplétude et l’absence de l’autre, le besoin de cette partie manquante de nous-mêmes.

Participez à la discussion !