Mille gouttes opalines

Un senryū érotique chaque matin, pendant mille jours

Six-cent-soixante-neuvième goutte

Alfred Delvau dans
Son Dictionnaire érotique
Nique le lexique.   

Rien de moins sexy qu’un dictionnaire, me direz-vous. Celui d’Alfred Delvau (1825-1867) constitue toutefois une splendide exception à la règle, son sujet est la qualité de sa base documentaire favorisant à merveille la lecture d’une seule main. Petit chroniqueur du Paris nocturne du Second empire, Delvau aurait sombré définitivement dans l’oubli n’eut été de sa passion pour l’argot et surtout les mots de la sexualité. Se qualifiant lui-même de «Saint-Vincent-de-Paul des nombreux mots orphelins qui grouillent dans le ruisseau», il a sauvé du naufrage une foule d’expressions rares qu’il a su maintenir en vie grâce à des explications dont la clarté n’est surpassée que par son goût de l’anecdote croustillante.

Tiré à trois cent exemplaires, le Dictionnaire érotique moderne fut condamné à la destruction totale par le tribunal correctionnel de la Seine en juin 1865, qui la qualifia de l’ouvrage «le plus froidement immonde qui existe».

Vous croyez être un·e érudit·e des mots de l’amour? Voici neuf entrées tirées du Dictionnaire, pour tester vos talents de lexicographe graveleux·se. Leur signification se trouve plus bas, juste après l’illustration, alors ne trichez pas en allant voir tout de suite !

  1. Avoir les talons courts
  2. La bataille de Jésuites
  3. Le cliquetage
  4. La cousine de vendange
  5. Écraser ses tomates
  6. L’oraison jaculatoire
  7. Faire la patte d’araignée
  8. Le précurseur
  9. Le tire-bouchon américain

Avoir les talons courts
«Se laisser volontiers renverser sur le dos par un homme: bander facilement pour les porte-queue.»

La bataille de Jésuites
«Se masturber, les jésuites ayant inventé le plaisir solitaire — après Onan.»

Le cliquetage
«Cliqueter une femme, la baiser, faire aller dans son vagin le membre viril comme un cliquet de moulin — avec moins de bruit cependant.»

La cousine de vendange
«Femme que l’on baise sur la table de certains cabarets borgnes, moyennant bouteille et quelque monnaie.»

Écraser ses tomates
«Avoir ses menstrues, dont la couleur est voisine germaine de la pomme d’amour.»

L’oraison jaculatoire
«Darder son aiguillon et lancer son sperme dans le con d’une femme, pendant qu’elle fait sa prière — sur le dos.»

Faire la patte d’araignée
«Passer doucement et habilement les quatre doigts et le pouce sur le membre viril d’un homme, et ses tenants et aboutissants, afin de provoquer une érection qui ne viendrait pas sans cette précaution.»

Le précurseur
«Le médius, qui est le saint Jean-Baptiste de la jouissance, dont le vit est le Christ.»

Le tire-bouchon américain
«C’est la toquade de toutes les grisettes. Elles font asseoir l’homme sur une chaise, mettent son bouchon au vent ; puis, s’asseyant à cheval sur lui en s’appuyant sur le dos de la chaise, elle se font entrer ledit bouchon dans le con tant qu’elles peuvent, tirent, se renforcent dessus, jouissent comme des carpes pâmées et s’en donnent ainsi jusqu’à ce qu’elles soient tout à fait échinées.»

Évidemment, les petit·es malin·es se sont rué·es sur la version en ligne offerte par Wikisource pour avoir les réponses (et on les félicite pour leur initiative !)

Une réponse à « Six-cent-soixante-neuvième goutte »

  1. Avatar de Huit-cent-cinquante-neuvième goutte – Mille gouttes opalines

    […] n’avez rien compris de ce senryū raconte. Si c’est le cas, appelons Alfred Delvau (encore lui) et son Dictionnaire érotique moderne à la rescousse […]

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