Tu te prends pour un
Libertin de qualité
Comme Mirabeau.

Dans Juliette, Sade jugeait sévèrement les œuvres érotiques de Honoré Gabriel Riqueti, comte de Mirabeau. Selon lui, « il voulut être libertin, pour être quelque chose et qui n’est et ne sera pourtant rien de toute sa vie. […] Une des meilleures preuves du délire et de la déraison qui caractérisèrent, en France, l’année 1789 est l’enthousiasme ridicule qu’inspira ce vil espion de la monarchie.» Il avait raison en ce qui concerne les liens que Mirabeau entretenait avec Louis XVI, mais il était un peu sévère envers un collègue et concurrent pornographe.

Le Libertin de qualité a été publié pour la première fois en 1783 (sous le titre de Ma conversion). Il s’agit du récit d’un jeune gentilhomme ruiné qui décide de se prostituer et qui, ne pouvant «plus foutre que pour de l’argent», devient «étalon juré des femmes sur le retour» en leur apprenant «à jouer du cul à tant par mois».
Ses amours tarifées avec une plantureuse Américaine, avec la vieille Madame In Aeternum ou avec Mimi la Tribade, se déroulent en scène violentes, obscènes et bouffonnes. On reconnaît parmi les héroïnes de contemporains (la duchesse de Polignac, par exemple, qu’il appelle la marquise de Vit-au-Conas) et même Mlle Guimard évoquée sous son propre nom. Ce libertin se fait révolutionnaire en prophétisant: «Une révolution, éloignée peut-être mais certaine, menace de nouveau le monde; nous foulerons aux pieds ces hommes superbes qui osent nous dédaigner.» Le style canaille du récit – qui était supposément celui de Mirabeau lui-même dans l’intimité – donne un relief aux situations décrites.
Extrait:
On s’imagine bien que la matinée ne se passe pas sans que je me rende chez ma bonne. On m’introduit au petit jour. La fidèle Macao me donne des conseils pour plaire à madame, et je lui sacrifie une parcelle de mon or pour en gagner un monceau. Ma vieille me reçoit avec toutes les grâces possibles… mais, ô surprise ! …avez−vous jamais vu une pomme qu’on place sur le récipient d’une machine pneumatique ? Chaque coup de piston semble lui rendre sa fraîcheur, sa peau ridée devient lisse, et les rayons du jour qui s’y réfléchissent lui donnent un vermeil qu’elle avait perdu… voilà l’état de ma vieille ; ses yeux sont dérougis, elle semble soufflée, et si elle avait des cheveux, de la gorge et des dents, elle serait foutable… ma main batifole, un sourire enfantin la ranime… quand elle me chasse très sérieusement pour mettre ordre à ses affaires.

À demain pour un autre tercet obscène.
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