Mille gouttes opalines

Un senryū érotique chaque matin, pendant mille jours

Trois-cent-quarante-deuxième goutte

Dans les Dialogues
De Lucien, je reconnais
Des copines à moi.

Pas tous les Dialogues de Lucien de Samosate (120-180), évidemment – je ne suis pas copine avec des morts ou des dieux. Je parle ici de ses célèbres Dialogue des courtisanes – mes consœurs d’il y a deux millénaires.

Faisons-nous plaisir et lisons un extrait du dialogue entre Leaina, joueuse de cithare, et Klônarion, son amie.

Leaina

Elles m’ont baisée, d’abord, comme des hommes, et non seulement en appliquant les lèvres, mais en entr’ouvrant la bouche, et elles m’étreignaient dans leurs bras et elles m’écrasaient les seins. Dèmônassa même me mordait dans ses baisers. Pour moi je ne comprenais pas ce qui se passait. Enfin Megilla déjà chaude ôta sa fausse chevelure, tout à fait semblable [à une vraie], et naturelle, et apparut rasée jusqu’à la peau comme un courageux athlète. Et moi je fus bouleversée de voir cela. Mais elle : « O Leaina, dit-elle, as-tu déjà vu un jeune homme aussi beau ? — Mais, dis-je, je ne vois pas de jeune homme ici, ô Megilla. — Ne m’effémine pas, dit-elle, car je m’appelle Megillos et j’ai épousé depuis longtemps cette Démônassa, et elle est ma femme. » Je me suis mise à rire, Klônarion, et sur ces mots j’ai dit : « Ainsi donc, ô Megillos, tu étais un homme à notre insu, comme on dit qu’Akhilleus est resté chez les filles, caché par sa robe de pourpre ?… et tu as la virilité et tu fais à Démônassa ce que font les hommes ? — Cela, dit-elle, ô Leaina, je ne l’ai point. Mais il ne s’en faut pas de beaucoup… Tu me verras m’unir d’une façon spéciale, qui est bien plus voluptueuse. — Mais tu n’es pas un hermaphrodite, dis-je, comme on raconte qu’il y en a beaucoup, qui ont les deux organes. » Car je ne savais pas encore, ô Klônarion, ce que c’était, « Non, dit-elle, mais je suis tout à fait mâle. — J’ai entendu parler, continuai-je, par la Boïotienne joueuse de flûte Ismênodôra, de cette femme Thêbaine qui est devenue homme, et ce fut un devin excellent, je crois, appelé Teiresias. Est-ce qu’il ne t’est pas arrivé un accident comme celui-là ? — Non, Leaina, dit-elle. Je suis venue au monde semblable à vous autres femmes ; mais j’ai les goûts, les désirs et tout le reste d’un homme. — Et cela te suffit, dis-je, les désirs ? — Laisse-toi faire, Leaina, si tu ne me crois pas, dit-elle, et tu reconnaîtras que je n’ai rien à envier aux hommes. J’ai quelque chose à la place de la virilité… Mais laisse-toi faire et tu verras. » Je me suis laissée faire, Klônarion ; elle me suppliait tant ! et aussi, elle me donnait un collier splendide, avec des tuniques du lin le plus fin. Alors, moi, je l’ai serrée dans mes bras comme un homme, elle m’a fait des baisers, elle s’est unie à moi en haletant et il m’a paru qu’elle jouissait excessivement. »

Klônarion

Mais, comment s’est-elle unie ? de quelle manière ? Ô Leaina, dis-moi cela surtout !

Leaina

Ne me demande pas de détails. Ce sont des choses honteuses. Aussi, par l’Ouranienne, je ne le dirai pas.

À demain pour un autre tercet obscène.

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